lundi 14 mars 2016

"Il est de retour", une fiction sans surprise...



En 2011, Hitler se réveille à Berlin, après des décennies d'absence inexpliquées (et qui ne le seront pas, là n'est pas le propos).
Pour lui, 1945, c'était hier. Il a juste dormi quelques heures.
Vous imaginez bien qu'il va vite se rendre compte que Berlin est loin d'être la ville dévastée qu'il a laissée la veille !
Cette énigme, ce saut fabuleux dans le futur incompréhensible, tout cela ne va pas le perturber bien longtemps. Hitler reste Hitler et n'a qu'un seul but, continuer, reprendre, terminer le travail commencé au milieu du XXème siècle. Et s'il est toujours là, et peu importe par quel miracle, ma foi, c'est bien la preuve que cette mission lui est assignée personnellement. À lui et à personne d'autre.
Seul souci, il va falloir composer avec ce nouveau monde moderne.
Avec les gens tout d'abord, qui ne peuvent évidemment pas comprendre qu'il est le vrai Hitler. Tous pensent qu'ils sont en présence d'un imitateur de grand talent, qui investit son personnage 24h/24h. Une performance artistique poussée à l'extrême dont le propos est la satire sans limite.
Une chaîne de télé lui met rapidement le grappin dessus en lui proposant une chronique dans l'émission d'un comique à succès. Le revenant créé immédiatement le buzz et vole la vedette au présentateur en place.


Le discours d'Hitler est le même qu'en 1945. Beaucoup crient au génie. Pour eux, il critique le système actuel pour mieux pointer du doigt les failles du pays. "En voilà un au moins qui ne mâche pas ses mots. Et ça fait du bien, en ces temps de crise..." Il y a bien quelques voix scandalisées qui s'élèvent, trouvant la parodie (ce qu'ils croient être) de très très mauvais goût (À ce point là, on ne peut pas en rire) mais elles ont peu de poids face à l'énorme boule de neige qui se met en mouvement.
Le Hitler est malin. Il comprend vite l'avantage qu'il va pouvoir tirer des nouveaux outils de communication, surtout internet.

Le postulat de départ est génial. Tout comme la couverture, hyper graphique, minimaliste, lisible en un coup de pinceau noir. Bravo !
Les premières dizaines de pages sont prenantes. On sourit beaucoup des situations auxquelles est confronté le Hitler revenu de nulle part, de ses multiples étonnements également.
Le quiproquo est énorme. Tout le monde pense qu'Hitler n'est pas Hitler mais un génie de l'imitation. Les gens cherchent bien à percer le mystère de l'identité de cet homme en l'interrogeant et le monsieur est on ne peut plus sincère à chaque fois. Il est Hitler, point. Et ses interlocuteurs d'encenser la performance époustouflante, l'investissement personnel de l'artiste...
On dirait vraiment le vrai ! C'est fantastique !
Et le bonhomme s'en sort à chaque fois par un tour de passe.

Malheureusement, le récit fait vite du surplace. Ou avance bien lentement. Le comique de situation né du quiproquo d'origine finit par s'user.
Le récit évoque régulièrement les pensées d'Hitler, et même si le roman est d'un niveau très accessible, il faut quand même avoir de bonnes notions sur le sujet pour tout saisir. Si ce n'est pas le cas, cela n'empêche en rien de suivre, mais c'est toujours un peu frustrant de se sentir un peu largué et de ne pas capter toutes les références. Et puis l'histoire n'avance tout simplement pas pendant ce temps-là. Il ne se passe rien niveau scénario.
Quant à l'impact de ce "nouveau" Hitler sur les Allemands, on aurait aimé en savoir plus. Quasiment personne ne s'en méfie car on ne le prend pas pour qui il est vraiment... Certes, mais cela manque d'approfondissement.
Il n'y a pas de fin. Pas une dans le sens où j'aime les trouver dans un roman. J'aime que l'auteur fasse un choix clair et propose une fin lisible. Je n'aime pas avoir la mission d'imaginer la suite. Comme c'est le cas ici.
Hitler s'est fait agressé, il séjourne à l'hôpital et la "vedette" reçoit le soutien de nombreuses personnes. Les dirigeants de différents partis politiques cherchent à le récupérer. Une éditrice, flairant la poule aux œufs d'or, le contacte pour lui proposer d'écrire un livre. Tout semble bien se profiler pour lui. Il est en place. Et on coupe là.
Le message de l'auteur est basiquement la dénonciation du risque d'un retour aux erreurs du passé. L'accession au pouvoir par les voies démocratiques se profile... L'Histoire est susceptible de se reproduire pour qui sait habilement surfer sur la recrudescence des idées nationalistes, et le mécontentement général.
Le propos est aussi simple que cela.

Bref... Peut-on rire de tout ? C'est une des idées diffusées dans le roman. J'avoue avoir du mal à donner une réponse (même si je penche plutôt pour le oui).
Ce qui est certain, c'est que je suis déçue car je m'attendais à être un chouia époustouflée. Je veux bien qu'on prenne Hitler comme sujet romanesque, qu'on le fasse de nouveau répandre ses théories nationalistes et raciales si c'est pour la bonne cause (la dénonciation) mais il faut alors pondre un bouquin qui déchire. Le sujet est trop important pour qu'il soit juste survolé.
Je n'en démords pas. Le roman est le genre littéraire le plus difficile qu'il soit pour moi, parce que pur produit de l'imagination et il faut beaucoup de talent pour produire une œuvre de fiction crédible et surprenante.

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